“Le Clan des Otori” ou redécouverte adolescente.

Si certaines odeurs nous ramènent à un souvenir, il est de ces livres qui marquent une époque de notre vie et qui, le temps d’une relecture, nous rappellent à elle.  Un de mes classiques – ou autres petites madeleines de Proust- est indéniablement le premier tome du Clan Des Otori : Le Silence du Rossignol de Lian Hearn. 

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Je faisais un bref passage en France il y a quelques semaines et regardais les livres laissés dans ma chambre. En quête d’une nouvelle lecture, je suis retombée sur ce roman. Au fur et à mesure que j’en parcourais les pages, le même rapport au texte que dans mes souvenirs d’adolescente, un lien presque viscéral,  s’établit. A nouveau, je ressentis une une certaine impuissance qui m’empêcha de refermer ce livre tant que je n’en aurais pas achevé la lecture, prisonnière des mots.

Lian Hearn écrit, dans ce qui s’avérera être la première pierre d’une série de cinq ouvrages, une histoire sublime empreinte  d’une sorte de pureté organique absolument magnifique.

Le Silence du Rossignol est sorti en 2002. Je ne parviens pas exactement à me rappeler si je l’ai lu dès sa sortie, ni même comment voire pourquoi j’avais choisi ce livre qui rien que par ses influences se situe en-dehors de mon paysage littéraire classique. Par exemple, la violence y est, dès le premier chapitre, décidément établie comme l’un des thèmes principaux. Ce qui m’a poussé à continuer cette lecture est sans aucun doute la délicatesse des termes employés liés à la justesse de la traduction. Les phrases qui s’enchaînent et émerveillent sont comme autant d’invitations au voyage vers ce japon féodal – imagé mais toutefois imaginé- dont la beauté submerge le lecteur.

Ce roman à deux voix est en quelque sorte un roman initiatique pour les deux personnages principaux Takeo Otori et Kaede Shirakawa. Les points de vue alternent, et les destins de ces deux personnages se retrouvent intimement liés. Takeo est un narrateur auto-diégétique tandis que son pendant féminin fait l’objet d’un récit à la troisième personne. Serait-ce un désir de la part de l’auteure d’apporter une certaine versatilité et légèreté au roman ou s’agit-il plutôt d’une représentation de l’image de la femme dans une société féodale japonaise ?

Le chant du rossignol frappe également de par l’absence de références culturelles immédiates. Bien que certains noms de villes soient mentionnés, les références sont plutôt évasives. En effet, Hearn parle de différents clans, de différentes allégeances, en ne mentionnant jamais des termes tels que samourais, il me semble que le terme de Geisha n’est pas non plus employé au cours de ce premier volume. Cette absence de marqueurs culturels permet, à mon sens, d’éviter les stéréotypes, un petit peu à la manière des nouveaux historicistes, rendant le récit d’autant plus prenant.

La découverte de ce Japon à la Hokusai est conduite par le personnage de  Takeo, qui, ayant dû quitter son village natal apprend sur une société qui, bien qu’elle lui soit sienne, lui est totalement étrangère.

Personnellement, il me semble que certaines occurrences du fantastique – Je fais ici référence aux pouvoirs de la Tribu- compromettent parfois la fluidité et l’unicité générale du texte. Le silence du Rossignol reste cependant un récit empreint d’une élégance et d’une pudeur toute particulière qu’il serait  bien trop réducteur que de ranger dans cette boîte souvent dénigrée de littérature jeunesse.

Référence :

Hearn, L. (2002). Le Silence du Rossignol. (P. Giraudon, Trad.) (Folio, Vol. I). Paris: Gallimard Jeunesse. ISBN 2-07-030258-X

lien vers le site officiel du Clan des Otori avec, en prime, quelques extraits du texte :

http://www.leclandesotori.com/index_swf.htm